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ITINÉRANCE

1 - LEGRAND LUSTUKRU

Entendez-vous dans la plaine

Ce bruit venant jusqu'à nous ?

On dirait un bruit de chaîne

Se trainant sur les cailloux ;

C'est le grand Lustucru qui passe ,

Qui repasse et s'en ira

Emportant dans sa besace

Tous les petits gâs

Qui ne dorment pas !

Lon lon la, etc

​

Quelle est cette voix démente

Qui traverse nos volets ?

Non, ce n'est pas la tourmente

Qui joue avec les galets ;

C'est le grand Lustucru qui gronde

Qui gronde ... et bientôt rira

En ramassant à la ronde

Tous les petits gâs

Qui ne dorment pas !

Lon lon la, etc

​

Qui donc gémit de la sorte

Dans l'enclos, tout près d'ici ?

Faudra t-il donc que je sorte

Pour voir qui soupire ainsi ?

C'est le grand Lustucru qui pleure ;

Il a faim ... et mangera

Cru tout vif sans pain ni beurre ,

Tous les petits gâs

Qui ne dorment pas !

Lon lon la, etc

​

Qui voulez-vous que je mette

Dans le sac au vilain vieux ?

Mon Dorik et ma Jeannette

Viennent de fermer les yeux ;

Allez-vous en méchant homme

Quérir ailleurs vos repas !

Puisqu'ils font leur petit somme

Non vous n'aurez pas

Mes deux petits gâs

Lon lon la, etc

​

2 - GOÉLANDS ET GOÉLETTES

Allons voir les goélettes

Dans le bassin de Paimpol :

Les goélands, les mouettes

Les caressent dans leur vol ;

Puis, quand les vaguent s'élancent

A l'assaut du quai noirci ,

Les goélands s'y balancent ,

S'y balancent ...

Les goélettes aussi !

​

Les grands oiseaux d'aventures

Vont se perdre dans les cieux ;

Les bateaux et leurs mâtures

Tendent leurs longs bras vers eux ,

Les jours et les mois s'envolent ,

L'hiver passe sans souci ! ...

Les goélands se désolent ,

Se désolent ...

Les goélettes aussi !

​

Lorsque février arrive

Les goélands sont joyeux ...

Des voix pleurent sur la rive

La complainte des adieux !

"Vos Paimpolaises sont belles ,

Islandais ! restez ici ... !"

Les goélands ont des ailes,

Ont des ailes ...

Les goélettes aussi ! ...

​

3 - L OCEAN

Jadis, au bas de la falaise,

J'avais une belle maison

Où je pouvais chanter à l'aise,

Du matin au soir, ma chanson ...

Un jour, l'océan mugissant

A soufflé dessus en passant ...

Il a démoli ma maison !

J'en perdis presque la raison :

Je dois le haïr ! et pourtant,

Malgré moi, j'aime l'océan !

​

J'avais pour aller à la pêche,

Un solide et léger bateau

Qui, plus rapide qu'une flèche,

Malgré l'ouragan, fendait l'eau ...

L'océan, sans presque y toucher,

L'a jeté sur un gros rocher !

Il a fendu mon vieux bateau

Depuis l'étrave à l'étambot :

Je dois le haïr ! et pourtant,

Malgré moi, j'aime l'océan !

​

Pour égayer ma nuit profonde,

J'avais un vaillant petit fieux :

Je l'aimais plus que tout au monde :

Il était si bon pour son vieux !

Mais le flot, cet ogre maudit

Me l'a dévoré l'autre nuit !

Il m'a volé mon pauvre fieux

Qui devait me fermer les yeux :

Je dois le haïr ! et pourtant,

Malgré moi, j'aime l'océan !

​

4 - LA PAIMPOLAISE

Quittant ses genêts et sa lande

Quand le Breton se fait marin

En allant aux pêche d'Islande

Voici quel est le doux refrain

que le pauvre gars

Fredonne tout bas

"J'aime Paimpol et sa falaise

Son église et son grand pardon.

J'aime surtout la Paimpolaise

Qui m'attend au pays Breton"

​

Quand leurs bateaux quittent nos rives

Le curé leur dit "Mes bons fieux

Priez souvent Monsieur saint Yves

Qui nous voit des cieux toujours bleus"

Et le pauvre gars

Fredonne tout bas

"Le ciel est moins bleu n'en déplaise

A saint Yvon notre patron

Que les yeux de ma Paimpolaise

Qui m'attend au pays Breton"

​

Le brave Islandais sans murmure

Jette la ligne et le harpon

Puis dans un relent de saumure

Il s'affale dans l'entrepont

Et le pauvre gars

Soupire tout bas

"Je serais bien mieux à mon aise

Devant un joli feu d'ajonc

A côté de ma Paimpolaise

Qui m'attend au pays Breton"

​

Mais souvent l'océan qu'il dompte

Se révélant lâche et cruel

Le jour venu quand on se compte

Bien des noms manquent à l'appel

Et le pauvre gars

Fredonne tout bas

"Pour aider la pêche Islandaise

Comme il faut plus d'un mousaillon

J'en f'rons deux à ma Paimpolaise

En rentrant au pays Breton"

​

Puis quand la vague le désigne

L'appelant de sa grosse voix

Le brave Islandais se résigne

En faisant un signe de croix

Et le pauvre gars

Quand vient le trépas

Serrant la médaille qu'il baise

Glisse dans l'océan sans fond

En songeant à la Paimpolaise

Qui l'attend au pays Breton !

​

5 - DORS, MON GÂS

A côté de ta mère

Fais ton petit dodo

Sans savoir que ton père

S'en est allé sur l'eau

La vague est en colère

Et murmure là bas :

"A côté de ta mère

Fais dodo, mon p'tit gâs".

​

Pour te bercer, je chante

Fais bien vite dodo

Car dans ma voix tremblante

J'étouffe un long sanglot

Quand la mer est méchante

Mon cœur sonne le glas

Mais il faut que je chante

Fais dodo, mon p'tit gâs.

​

Si la douleur m'agite

Lorsque tu fais dodo

C'est qu'un jour on se quitte

Tu seras matelot

Sur la vague maudite

Bien loin tu t'en iras

Ne grandis pas trop vite

Fais dodo, mon p'tit gâs.

​

6 - LES GRANDS BERCEAUX

Autrefois, tout petits hommes,

Dans nos tout petits berceaux

Que nous faisions de bons sommes

Près des grands lits à fuseau !

Aujourd'hui, la Mer profonde,

Nous a pris à nos mamans

Et balance autour du monde

Nos trois-mâts ... berceaux géants !

​

Bercez nos adieux

Grands berceaux de chêne,

Qui cinglez joyeux

Vers la mer lointaine.

Vos pauvres marins

Ont le cœur en peine !

Grands berceaux chêne,

Bercez nos chagrins !

​

Beaux trois-mâts si fiers en rade,

Beaux vaisseaux, gare aux écueils !

Car à plus d'un camarade

vous servirez de cercueil :

Sur les rocs qui les défoncent

Les flancs noirs se sont ouverts

Et les grands berceaux s'enfoncent,

Lentement, dans les flots verts !

​

Bercez nos trépas

Grands berceaux-épaves

Lorsque, tout en tas,

Nous coulons, en brave !

Que nos songes graves

N'aient plus de réveil ! ...

Grands berceaux-épaves

Bercez nos sommeils !

​

Cependant bien des semaines,

Bien des mois se sont passés

Et toujours, dans leur carènes ,

Les trois-mâts nous ont bercés ;

Le bon vent, gaîment nous pousse ;

La Bretagne n'est pas loin :

Déjà la Brise est plus douce

Et sent bon l'odeur du foin !

​

Bercez notre espoir

Grands Berceaux de Rêve :

A l'horizon noir

La France se lève !

Déjà nos amours

Rôdent sur la grève ...

Grands Berceaux de Rêves

Bercez nos Retours !

​

7 - LE PETIT GRÉGOIRE

La maman du petit homm'

Lui dit un matin :

"A seiz' ans t'es haut tout comm'

Notre huch' à pain !

A la ville tu peux faire

Un bon apprenti !

Mais pour labourer la terre :

T'es ben trop petit, mon ami,

T'es ben trop petit,

Dame oui !"

​

Dans son palais de Versailles

Fut trouver le Roi

"Je suis gâs de Cornouailles,

Sire, équipez moi !"

Mais le bon Roi Louis Seize,

En riant lui dit :

"Pour être garde-française

T'es ben trop petit, mon ami,

T'es ben trop petit,

Dame oui !"

​

La guerre éclate en Bretagne

Au Printemps suivant,

Et Grégoire entre en campagne

Avec Jean Chouan ...

Les balles passaient, nombreuses

Au-dessus de lui

En sifflotant, dédaigneuses :

"Il est trop petit, ce joli,

Il est trop petit,

Dame oui !"

​

Cependant, une le frappe

Entre les deux yeux ...

Par le trou l'âme s'échappe :

Grégoire est aux cieux !

Là, Saint-Pierre , qu'il dérange,

Lui dit : "Hors d'ici !

Il nous faut un grand Archange :

T'es ben trop petit, mon ami,

T'es ben trop petit,

Dame oui !"

​

Mais en apprenant la chose,

Jésus se fâcha,

Entr'ouvrit son manteau rose

Pour qu'il s'y cachât ;

Fit entrer ainsi Grégoire

Dans son Paradis

En disant : "Mon ciel de gloire,

En vérité je vous le dis,

Est pour les petits !

Dame, oui !"

​

​

8 - LE COUTEAU

-"Pardon, Monsieur le Métayer,

Si, de nuit je dérange ;

Mais je voudrais bien sommeiller

Au fond de votre grange !

- Mon pauvre ami, la grange est pleine

Du blé de la moisson ;

Donne toi plutôt la peine

D'entrer dans la maison !"

​

-"Mon bon Monsieur, je suis tout gueux ;

Qué gâchis vous ferais-je !

Je suis pied-nus, sale et boueux !

Et tout couvert de neige !

- Mon pauvre ami, quitte bien vite

Tes hardes en lambeaux ;

Pouille moi ce tricot, de suite

Chausse moi ces sabots !"

​

-"De tant marcher à l'abandon

J'ai la gorge bien sèche :

Mon bon Monsieur, baillez-moi donc

Un grand verre d'eau fraîche !

- L'eau ne vaut rien lorsque l'on tremble

Le cidre ... guère mieux ;

Mon bon ami, trinquons ensemble ;

Goûte-moi ce vin vieux !"

​

-"Mon bon Monsieur, on ne m'a rien

Jeté, le long des routes ;

Je voudrais avec votre chien

Partager deux, ou trois croûtes !

- Si depuis ce matin tu rôdes,

Tu dois être affamé ;

Voici du pain des crêpes chaudes,

Voici du lard fumé !"

-Chassez du coin de votre feu

Ce rôdeur qui n'en bouge :

Êtes-vous " Blanc" ? êtes-vous "bleu" ?

Moi, je suis plutôt "Rouge" !

- qu'importe ces mots: République,

Commune ou Royauté :

Ne mêlons pas la politique

Avec la Charité !"

Puis le métayer s'endormit,

La minuit étant proche ...

Alors, le vagabond sortit

Son couteau de sa poche

L'ouvrit, le fît luire à la flamme,

Puis, se dressant soudain,

Il planta sa terrible lame

Dans ... la miche de Pain !

​

Au matin jour, le gueux s'en fut,

Sans vouloir rien entendre ...

Oubliant son couteau pointu

Au milieu du pain tendre ...

​

Vous dormirez en paix, ô riches !

Vous et vos Capitaux,

Lorsque les gueux auront des miches

Où planter leurs couteaux !

9 - LA DERNIÈRE ÉCUELLE

Mon père était fin sabotier

M'apprit lui-même le métier

La la la li déra !

Nous tournions des écuelles.

La la la li déra !

Nous tournions des écuelles.

​

Que j'allais vendre à Lanion ...

Sur un petit cheval grison

Plus vif que l'hirondelle !

Nous tournions des écuelles

Plus vif que l'hirondelle !

Nous tournions des écuelles

​

Levés avant le matin-jour ,

Nous virions encor' notre tour,

Le soir à la chandelle !

Nous tournions des écuelles

Le soir à la chandelle !

Nous tournions des écuelles

​

Las ! ma Doué ! ceux de chez nous

Ne mangent plus leur soupe aux choux ,

Dans la blanche vaisselle !

Nous tournions des écuelles

Dans la blanche vaisselle !

Nous tournions des écuelles

​

On ne veut plus des blancs sabots :

Les noirs souliers sont bien plus beaux.

C'est la mode nouvelle .

Nous tournions des écuelles

C'est la mode nouvelle .

Nous tournions des écuelles

​

Et nous pleurons de désespoir

Sur la tarrière et le parroir ...

Bonsoir, la clientèle !

Nous tournions des écuelles

Bonsoir, la clientèle !

Nous tournions des écuelles

Bonsoir, la clientèle !

Nous tournions des écuelles

​

Donnez, donnez avec pitié,

La soupe au dernier sabotier,

Plein la dernière  écuelle

Nous tournions des écuelles

Plein la dernière  écuelle

Nous tournions des écuelles

​

10 - BERCEUSE NOIRE

Durant que ton père

Rampe dans la nuit,

Dors, prés de ta mère,

Dans ton petit lit !

​

REFRAIN

Fais dodo

Bien au chaud, là haut :

Y a trop de misère

Sous terre !

Fais dodo

Mon joli Tiennot :

Tu suivras ton père

Bientôt !

​

Le mineur ignore

Les jours radieux

La rieuse aurore,

Les midis joyeux !

​

Dans son purgatoire

Il va d'un pas lent ;

Plus sa main est noire,

Plus ton pain est blanc !

​

Sa tâche est féconde

Qu'on paye si peu

Que ferait le monde

Sans charbon ? sans feu ?

​

Autour de la mine,

Quand l'homme est au fond

La femme se mine

D'un chagrin profond

​

Quand aux jours d'épreuves,

Gronde le grisou,

Que de tristes veuves

Il fait tout d'un coup !

​

Quand on parle grève,

Toutes nous pleurons :

Car de faim l'on crève

Au fond des corons !

​

Mais, à nous sans doute,

Demain sourira :

La justice en route

Nous consolera !

​

DERNIER REFRAIN

Fais dodo

Mon joli Tiennot :

Y a trop de misère

Sur terre !

Pour nous tous, sur terre ou là-haut,

luira la lumière

Bientôt !

​

11 - MONSIEUR PARVENU ...

Lorsque Parvenu s'approche,

L'on entend

Valser au fond de sa poche

L'or avec l'argent

Mais ses bons écus lui chantent

Tous à qui mieux mieux :

"Tes héritiers s'impatientent

Mon vieux tu vis trop vieux ...

​

Lorsque Parvenu déguste

Ses repas

Auquel il n'a que tout juste,

Ses huit ou dix plats,

Son champagne et son bourgogne

Doivent lui chanter :

"Que te voilà rouge ivrogne !

Mais, tu vas éclater ! ...

​

REFRAIN

Pauvre Monsieur Parvenu

Ici bas, tout nu venu

Malgré ta fortune

Tu ne t'en iras que tout nu

Tout nu !

Tout nu !

​

Quand Parvenu, dos en boule,

Sans rien voir,

En automobile roule

Du matin au soir,

Son moteur lui dit : "En somme,

Pourquoi tant courir ?

Crains-tu de rater , pauvre homme,

Ton heure de mourir ?

​

Lorsque Parvenu s'enflamme

A son tour,

En vain cherche-t-il la femme

Qui l'aime d'amour !

Lorsque par hasard on l'aime

Il se dit encor' :

"Suis-je adoré pour moi-même ...

Ou pour mon coffre-fort ?

​

REFRAIN

​

Parvenu qui n'est qu'un cuistre.

Croit devoir

Flatter tout nouveau ministre

Qui monte au pouvoir :

Aussi l'on vous le décore

Au petit bonheur

Des Palmes ou mieux encore,

De la Légion d'Honneur !

​

Enfin, Parvenu trépasse

Dans son coin ...

Un joyeux croque-mort passe

Qui, seul en prend soin ...

Et l'ultime égalitaire

En chapeau ciré

Chante en le visant en bière

Ce gai Miséréré :

​

REFRAIN FINAL

Pauvre Monsieur Parvenu

Ici bas, tout nu venu

Malgré ta fortune

Tu ne t'en va donc que tout nu

Tout nu !

Tout nu !

​

12 - L ÉCHO

Rôdant triste et solitaire,

Dans la forêt du mystère,

J'ai crié le cœur très las :

"La vie est triste ici bas !"

Bah !

L’écho m'a répondu :

Bah !

J'ai repris, la voix touchante.

"Écho la vie est méchante !"

Chante !

L’écho m'a répondu :

Chante !

Écho ! écho des grands bois !

Lourde,

Trop lourde est ma croix !

Crois !

L’écho m'a répondu :

Crois !

La haine en moi, va germer !

Dois-je rire ? ou blasphémer ?

Aimer

Et l'écho m'a dit :

Aimer !

Comme l'écho des grands bois,

Me conseilla de le faire

J'aime,

Je chante,

Et je crois ...

Et je suis heureux sur terre !

​

KENAVO AR WECH ALL ! ...

Kénavo !
Kénavo !
Puisque (mon / ton) grand bateau
Doit (m' / t') emporter bientôt
Kénavo !
Kénavo !
Dans un dernier sanglot
Quittons nous sur ce mot :
Kénavo !

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